L’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche suscite de nombreuses craintes sur sa politique énergétique et son impact climatique. Paradoxalement, elle représente aussi une opportunité pour l’Europe de renforcer son indépendance énergétique, sa compétitivité et son attractivité économique à long terme.
Les premières décisions prises suite à l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche sont des signaux forts et clairs de la nouvelle stratégie énergétique et climatique américaine. La sortie de la FED du groupe mondial de réglementation du changement climatique et la suspension de financements publics verts aux États-Unis attestent d’un choix clair et affirmé de privilégier le court terme via les énergies fossiles au détriment de la construction d’un système énergétique pérenne, non carboné et protecteur des enjeux climatiques.
Une approche américaine opportuniste
Les États-Unis, en adoptant une posture de repli sur les ressources fossiles, font le choix de répondre à une problématique de maîtrise des coûts énergétiques par la solution de facilité conduisant à développer de nouvelles capacités de production énergétique carbonées. Ce choix est une décision stratégique assumée basée sur d’abondantes ressources nationales, notamment en pétrole et gaz. Cette nouvelle politique énergétique sera sans doute inefficace sur un horizon long terme eu égard à la non-pérennité du recours aux ressources fossiles. Elle sera à n’en pas douter dommageable pour des systèmes climatiques qui montrent jours après jours une instabilité grandissante.
De plus, ces décisions créent un flou réglementaire et juridique sur la continuité des projets existants aux Etats-Unis. La crainte de conséquences au niveau international est réelle et un effet domino envisageable. ll sera alors difficile pour les Etats-Unis de mobiliser l’épargne disponible et d’attirer des capitaux étrangers pour continuer à développer cette industrie verte.
L’Europe face à un choix stratégique crucial
Contrairement aux États-Unis, l’Europe ne dispose pas de ressources fossiles abondantes disponibles. Il est vital pour l’Europe d’accélérer vers une transition pragmatique, non punitive, basée sur une indépendance énergétique affirmée, pour bâtir sur le long terme une économie résiliente et attractive
Les maîtres mots de cette transition sont la planification et la réglementation. A ce titre, l’Union européenne doit tirer les leçons du passé et s’inspirer de la stratégie mise en place par la France dans les années 1960 pour assurer son indépendance énergétique. Ce mouvement a conféré à la France un avantage compétitif de près de 50 ans via la production d’une électricité prévisible et à bas coût. Dans un monde où la production d’électrons non carbonés est fortement compétitive, cette transition énergétique repose sur la volonté politique d’orienter le système actuel vers l’électrification des usages et l’extension des capacités de production électrique non carbonée.
Seule une énergie prévisible et à bas coût donnera à l’Europe un avantage compétitif définitif, une indépendance énergétique long terme, renforcera son attractivité et permettra un développement économique pérenne.
Et pour se faire, l’Europe a tous les atouts. Une épargne abondante est disponible et viendra alimenter des besoins d’investissement massifs de cette transformation économique verte. Mais il faut aller vite car le reste du monde a déjà défini sa trajectoire énergétique et l’Europe semble manquer de volontarisme collectif pour faire bouger ses lignes.
Une opportunité pour l’Europe
La réorientation stratégique américaine constitue même une chance pour l’accélération de la transition énergétique européenne. Face à la fermeture des marchés américains, les composants asiatiques doivent trouver preneurs et l’Europe devient ainsi le premier marché d’envergure cible. Ce déséquilibre d’offre devrait permettre à l’Europe d’encore abaisser le coût des investissements en infrastructure et de renforcer ses capacités industrielles et technologiques dans le domaine des énergies renouvelables.
L’Europe se trouve donc à un moment charnière. Invitée par les Etats-Unis à renoncer à sa transition énergétique au profit d’une énergie carbonée, au prix imprévisible sur un horizon long terme et dommageable pour notre futur, elle ne doit pas tomber dans ce piège stratégique. Elle doit faire le choix de l’indépendance énergétique.
L’énergie est un enjeu politique et économique de long terme, nécessitant un volontarisme affirmé, des cadres réglementaires clairs et une planification à plusieurs décennies. Dans un système en cours de de-globalisation, par nature inflationniste, seule cette voie nous permettra de conserver notre souveraineté et de construire une Europe indépendante, influente, industrielle et attractive économiquement. L’Europe a les moyens de fédérer autour d’un projet commun : l’énergie.
Il est l’heure.